Moulin-à-Vent : 100 ans, et de futurs premiers crus ?
Lorsque l’on visite le Château du Moulin-à-Vent pour la première fois, les hôtes vous racontent une anecdote qui en surprendra plus d’un(e). Surtout si vous êtes de ceux/celles pour qui gamay
est synonyme de vin nouveau, et Beaujolais de petit vin pas cher.
Ressortant une carte des vins datant de la deuxième moitié du 19ème siècle, Morgane Chambriard, responsable marketing et communication du Château, nous laisse découvrir la différence de prix entre une bouteille de Moulin-à-Vent, et une bouteille de Gevrey-Chambertin. Non, nous n’avons pas la berlue : le Gevrey est 2 fois moins cher que le Moulin.
En plus de déboulonner nombre d’aprioris sur la qualité intrinsèque des vins du Beaujolais, ce simple prix sur une carte explique également la longue histoire des démarches de reconnaissance du cru Moulin-à-Vent. Retour en arrière et vers le futur.
Il y a 100 ans : une reconnaissance avant les appellations
Le capitalisme ne datant pas d’hier, les vignerons de Moulin-à-Vent étaient déjà en proie à cette époque aux vices de certains commerçants moralement peu recommandables, qui n’hésitaient pas à vendre de la piquette lambda sous l’étiquette du renommé Moulin-à-Vent.
Excédés de cette usurpation commercialement dangereuse, des vignerons s’unirent pour porter devant le tribunal de Mâcon, une demande de délimitation de l’aire de production des vins de Moulin.
C’est ainsi que naquit, le 17 avril 1924, la première délimitation d’aire de production des vins des Thorins et des vins de Moulin-à-Vent, allant au-delà des 6 hectares du lieu-dit et regroupant des produits de qualité analogues.
Un an plus tard naissait l’Union des producteurs, et le 11 septembre 1936, l’appellation Moulin-à-Vent fut entérinée, comptant parmi les toutes premières du territoire.
Un beau cadeau d’anniversaire : de futurs premiers crus ?
Dans la lignée du cru Fleurie, Moulin a décidé de se lancer dans la grande aventure de la reconnaissance de certains de ses lieux-dits en premier crus.
Comme en Bourgogne, l’appellation est divisée en plusieurs climats, c’est-à-dire en différentes parcelles présentant des caractéristiques particulières, à la fois géologiques, d’exposition et d’altitude, ayant chacune un impact sur le profil du vin qui en sera issu.
Les 14 lieux-dits qui prétendent à la classification en premier cru sont en effet majoritairement situés sur des sols granitiques, exposés sud et plutôt pentus.
Le dossier sera déposé auprès de l’INAO (Institut National de l’Origine et de la qualité), l’établissement public en charge du dispositif des signes officiels de qualité.
La réponse n’arrivera pas avant 2030 dans le meilleur des cas.
Pedigree des aspirants premiers crus
Comment choisit-on les meilleurs terroirs d’une appellation parmi sa multitude de lieux- dits ?
En gardant déjà à l’esprit que l’INAO part du principe que 30% maximum de la surface totale d’une appellation pourra être classé en cru, pour ne pas dénaturer le caractère exceptionnel de cette mention.
Sur les 14 candidats, l’appellation s’attend à ce que l’INAO en retienne une dizaine, en sachant que l’on compte 69 lieux-dits dans l’appellation.
Mais avant de présenter ces 14 finalistes, l’appellation a mené un important travail de hiérarchisation, principalement au travers de la dégustation.
Ce sont donc les qualités de chacun d’entre eux, sur le millésime 2020, qui ont été comparées, ainsi que leur potentiel de garde sur les millésimes 2009 et 2010, réputés pour être de très belles années pour les vins du Beaujolais.
2009 est également l’année de réalisation d’un outil extrêmement précieux, notamment pour les vignerons mais également pour tous ceux désireux de mieux comprendre le lien entre le sol et le profil du vin : les cartes géologiques de l’ensemble des terroirs beaujolais, permettant de mettre en lumière la concordance entre lieux-dits cadastraux et nature géologique.
Moulin-à-Vent montre bien une distinction assez nette entre l’est et l’ouest de l’appellation et la concentration des lieux-dits cadastraux présentés à l’INAO : la majorité à l’ouest, et/ou au milieu de l’appellation, sur des sols granitiques.
Dégustation comparée : vraie différence de terroirs ?
Evidemment. Bien que la main du/de la vigneron(ne) soit un composant essentiel dans la structure du vin (surtout dans une région où certains pratiquent la vinification semi-carbonique et d’autres la bourguignonne), les qualités intrinsèques des terroirs révèlent de véritables différences.
Chacun(e) aura ses préférences mais tous sont d’une évidente qualité. Les amateurs de puissance privilégieront le lieu-dit Rochegrès, tandis que ceux préférant des cuvées davantage sur la finesse et un côté aérien choisiront Aux Caves
ou Carquelin
pour ses arômes floraux plus marqués.
Champ de Cour se démarque par son côté juteux et charnu, les Thorins par un fruité joyeux et une structure à la fois fine et juteuse, tandis que La Rochelle séduit par son équilibre entre finesse et soyeux, aux arômes autant fruités, qu’épicés et à la belle minéralité, sur des tanins présents mais souvent fins et élégants.
La sélection Toutlevin
• Cave du Château de Chénas Coeur de Granit
• Château Bonnet Le Petit Brennay
• Château de Beauregard Moulin-à-Vent La Salomine
• Château des Jacques Clos des Thorins
• Château du Moulin-à-Vent Champ de Cour
• Domaine de Colette Moulin-à-Vent Au Mont
• Domaine de Colonat Les Grenèriers
• Domaine de la Rochelle Moulin-à-Vent
• Domaine de Rochegrès Rochegrès
• Domaine des Fontaines Moulin-à-Vent
• Domaine des Nugues Les Burdelines
• Domaine du Granit Les Caves
• Domaine du Clos du Fief Moulin-à-Vent Les Deschanes
• Domaine Famille Chermette Rochegrès
• Domaine Labruyère Le Carquelin
• Domaine Louis Boillot Aux Caves
• Domaine Richard Rottiers Les Thorins
• Maison Steeve Charvet Moulin-à-Vent
• Famille Guérin La vigne de mon père
• Maison Le Nid Rochegrès
• Domaine Les Deux flèches Les Grenèriers
• Paul Janin & Fils Héritage
• Domaine Thibault Liger-Belair Les Pérelles
Crédit photos : Pauline Gonnet
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