Athénaïs du Château de Béru, un retour aux sources chablisien

Athénaïs du Château de Béru, un retour aux sources chablisien

C’est sur la rive droite de Chablis que nous a emmené Thomas Noble, sommelier à La Côte Saint-Jacques, restaurant doublement étoilé situé à Joigny, une petite ville toute proche. Ici, il nous a fait découvrir une viticultrice engagée, au profil atypique. Devant ses pieds de vigne ou à la cave, Athénaïs de Béru nous a tout raconté de sa passionnante aventure viticole.

La vigne en héritage

Le Château de Béru, dont les murs ont été érigés au XIIème siècle, évoque d’abord une longue histoire familiale. Les ancêtres d’Athénaïs y produisent en effet du vin depuis 500 ans. Mais, comme tant d’autres dans le courant du XXème siècle, leur vignoble a été décimé par le phylloxéra. Il leur faudra une génération entière pour s’en remettre, jusqu’à ce que le père d’Athénaïs décide de reprendre le flambeau. Malheureusement, le rêve est de courte durée, et des ennuis de santé le poussent à les mettre en location auprès d’un fermier.  Il vendait toute la production en vrac, le domaine n’existait plus en tant que tel et les vins n’étaient pas vinifiés ici , nous explique-t-elle. La famille fait ses valises et quitte la région. Athénaïs grandit à Paris, y fait ses études et travaille dans une banque d’affaires.

Mais un rebondissement change cette trajectoire toute tracée : en 2005, le fermier prend sa retraite bien plus tôt que prévu, et Athénaïs se retrouve confrontée à un choix crucial, continuer dans la finance ou reprendre les vignes.  J’avais envie de tenter l’aventure, c’était un super concours de circonstances, d’un côté je tournais un peu en rond dans ce que je faisais, et de l’autre j’avais très envie de ce côté entrepreneurial. Et puis j’étais très attachée à ce lieu , souligne-t-elle. Elle demande donc au fermier d’étaler sa retraite, le temps pour elle de se préparer. Elle suit une formation à Beaune et multiplie les stages chez des viticulteurs partageant ses convictions pour en apprendre un maximum sur ce métier singulier. Quatre ans plus tard, elle récupère enfin les 15 hectares encore exploités aujourd’hui.

Un équilibre délicat

Athénaïs prend tout de suite des décisions déterminantes pour le futur du domaine. L’occasion également d’être en accord avec sa philosophie personnelle :  j’ai voulu passer les vignes en bio dès le début et très vite j’ai commencé à faire des essais en biodynamie. . Mais la transition s’avère compliquée, car la vigne était affaiblie par des années d’assistanat. Il a fallu trouver un équilibre différent, faire des essais… s’éduquer encore une fois, et ce, sur tous les aspects de l’organisation viticole.

La gestion de l’herbe, des rendements, des spécificités des parcelles, du soutirage, de la taille… la viticultrice nouvellement établie apprend sur le tas, trébuche, tombe parfois, et se relève toujours.  J’ai grillé toutes mes cartouches la première année, et petit à petit j’ai eu plus de coups de main. On m’a prêté du matériel, on m’a appris les gestes , dit-elle avec émotion. Les échanges se multiplient avec les vignerons de la région, ou en dehors des frontières bourguignonnes. Elle cite notamment Alice et Olivier DeMoor, Cyril Falle, Henri Milan Emmanuel Giboulot ou la famille Lafarge parmi ses mentors et amis.

Des vins sur mesure

Béru ce sont deux collines, dont l’une culmine à 400 mètres, et figure parmi les plus hautes de l’appellation.Sur chaque parcelle, tout est pensé en cohérence, pour préserver l’environnement et forger la personnalité des vins : les haies d’arbres aident à la biodiversité, le travail à la pioche préserve le sol, la qualité du matériel végétal est au cœur des attentions, les tisanes de plantes et le soufre sont utilisés à bon escient… Et sur ce point Athénaïs précise :  Je n’ai jamais eu de discours très tranché sur l’utilisation du soufre, car je trouve que c’est du sur- mesure. Il n’y a pas deux millésimes qui se ressemblent .
Justement, en 2017, le soufre n’était pas nécessaire pour La Côte aux Prêtres, une parcelle caractérisée par un piton de roches calcaires fossilisées emblématiques du chablisien.  J’aime beaucoup l’attaque, assez franc, beaucoup de peps. Il a un côté iodé, salin  nous explique Thomas Noble, déjà conquis par ses vins. Quant à Montserre, située un peu plus haut, elle délivre un 2017  plus fumé, juteux, avec un plaisir immédiat . Un vin authentique et légèrement plus rustique selon sa créatrice. Chaque parcelle est approchée différemment et offre une expression unique du Chardonnay.

Ainsi toutes les cuvées de la propriété ont une personnalité qui leur est propre, et dépendent principalement de la géologie et des aléas climatiques. Le rôle d’Athénaïs, lui, est de les sublimer,  on veut des vins qui reflètent la pureté de nos terroirs avec une vinification naturelle .

Des crus superbes, des vins de gastronomie mis en valeur par les grandes tables, comme elle aime à le rappeler. Ce fût donc une évidence qu’ils soient servis à La Côte Saint-Jacques, incarnation de l’éveil des sens située à Joigny et dont la cave se tourne de plus en plus vers des crus issus de vignobles respectueux de l’environnement, utilisant peu de souffre et offrant des qualités organoleptiques exceptionnelles.

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