Beaune, le réveil d’une AOP méconnue

Beaune, le réveil d’une AOP méconnue

Pommard, Volnay, Meursault…. Leur réputation les précède.
Laissant à Beaune le privilège de briller dans les yeux des touristes grâce à ses superbes hospices, d’être le centre de la célébrissime Côte-de-Beaune dont la constellation d’appellations précitées en éclipse le cœur, de figurer parmi les villes plus riches de France (pas tant en raison de la richesse de ses habitants, mais surtout en raison de l’absence de gens modestes, selon Jasper Morris), d’être la capitale française du gang des DDSM, les doudounes sans manches, ornement favori des vigneron(ne)s bourguignon(ne)s (mais pas que) qui confine à l’uniforme.

Et pourtant… Beaune est aussi une appellation à part entière, capable de produire quelques blancs et beaucoup de rouges de nature à faire succomber tous les amoureux de la Bourgogne.
Pourquoi cette (relative) désaffection ? Une réponse franche n’est pas à l’ordre du jour, mais plusieurs pistes existent.

Une si grande appellation

Small is beautiful. Voilà bien un mantra qui s’applique sans sourciller à la valeur d’une appellation bourguignonne. Or l’appellation Beaune totalise 300 hectares et 42 premiers crus (soit environ 70% de l’appellation…), dont le réputé Clos des Mouches, appartenant principalement aux maisons Drouhin et Chanson.

En plus de sa taille, certains s’interrogent sur le bien-fondé d’avoir une appellation avec une telle proportion de premiers crus, et sur une possible dévaluation desdits crus, selon l’autre adage commercial qui veut que ce qui est rare est cher, proche variant de l’assertion précédente.

L’histoire veut également que la mainmise sur l’appellation des négociants tels que Drouhin, Bouchard, Latour, Jadot, Bichot, Chanson ait créé un microcosme n’ayant laissé que peu d’opportunités intéressantes aux vignerons indépendants.
Si historiquement cette hypothèse a du sens, elle n’a plus cours aujourd’hui, de nombreux vignerons se réappropriant cette appellation et ses spécificités.

Qui est Beaune ?

C’est précisément parce qu’elle est d’une taille significative que sa richesse est grande. La classification en premier cru ne doit rien au hasard, et sa topographie générale ainsi que ses variations de sols et sous-sols promettent une diversité en fonction des parcelles.

Sans grand suspens, l’appellation Beaune est située sur le territoire de la commune éponyme, qui compte une autre appellation : l’AOP Côte de Beaune, située au nord, en haut du versant. Ce qui n’est pas Beaune 1er cru est en Beaune Villages. Certaines parcelles sont enclavées dans la ville tandis que la plupart se répartissent sur les coteaux, entre 225 et 340 mètres d’altitude, où s’épanouissent chardonnay et pinot noir.

Le vignoble est coupé en deux entités, séparées par une vallée sèche et profonde allant en direction de Bligny / Ouches, parsemées de combes. Le climat y est plutôt frais, aux brumes automnales et hivernales légendaires, avec une exposition sud / sud-est favorable à l’ensoleillement, et les premiers crus bénéficient généralement d’un substrat calcaire aux sols drainants, avec une exposition optimale face au soleil levant.

Carte extraite de
Carte extraite de "Les Vins de Bourgogne" - Editions Collection Pierre Poupon

Les parcelles les plus courues sont celles situées entre la ville et Les Mondes Rondes, avec notamment les premiers crus Les Grèves, Les Bressandes, Les Teurons, Les Avaux et les Champs Pimont.
Sans compter Beaune-Grèves, incluant le vignoble de la Vigne de l’Enfant Jésus de Bouchard, et Beaune-Boucherottes comprenant le Clos des Ursules de Louis Jadot, et bien évidemment le fameux Clos des Mouches précédemment cité.

En plus des négociants, les Hospices de Beaune, dont la vente aux enchères rythme le calendrier viticole annuel (lire notre article Les Hospices de Beaune 2021 par Bernard Burtschy), produisent également des cuvées en appellation Beaune (à noter d’ailleurs la belle initiative de Thérèse Besancenot, nouvelle présidente de l’ODG, qui a organisé cette année une dégustation des vins de l’appellation lors de ce même week-end, ce qui n’avait jamais eu lieu alors même que nous sommes en plein Beaune…).

Des vins au futur éclatant

Selon Frédéric Weber, maître de chai à la maison Bouchard, l’appellation a un beau futur, du fait de sa complexité, car nous sommes vraiment dans le sens des terroirs.
Propos confirmés par Jean-Pierre Renard, qui s’étonne que les vins ne soient pas plus connus, quand on voit la qualité des vins produits : finesse, équilibre, élégance, qui n’ont rien à envier aux voisines plus prestigieuses.
Des qualités auxquelles s’ajoutent la diversité des profils en fonction de la situation de la parcelle et selon son appartenance à la partie nord ou sud : dans le premier cas, les vins se révèleront plus intenses et plus puissants que les seconds, davantage sur la souplesse et la subtilité. Les pentes s’adoucissent en direction de Pommard, sur des sols calcaires, promettant subtilité et minéralité pour les vins qui en sont issus.

Parcelles Les Avaux
Parcelles Les Avaux

Il est toujours difficile de généraliser un profil aromatique d’une appellation, surtout lorsque la diversité des parcelles promet des nuances qui en font tout le charme et la valeur.
Il est toutefois possible de dégager certaines tendances, notamment la finesse des tanins et une tension élégante pour les vins rouges, assortis d’arômes de fruits rouges et noirs éclatants, avec une évolution possible sur la truffe et les épices. Quant aux blancs, leurs arômes fruités et floraux, reposant sur une texture agréablement tendue et fraîche, évolue vers le gras et la rondeur après quelques années.

Crédit photos : ODG Beaune

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