Des solutions numériques pour mieux protéger la vigne ?

Des solutions numériques pour mieux protéger la vigne ?

La vigne est une plante sensible à de nombreux agresseurs : maladies (mildiou, oïdium, black-rot, botrytis…), ravageurs (chenilles, cicadelles…) et virus (court noué, enroulement...). Mal maîtrisés, ils peuvent rapidement entamer le potentiel de production d’un vignoble, voire aboutir à une destruction totale de la récolte les années favorables au développement des maladies.

Afin de répondre à des enjeux environnementaux, sociétaux et réglementaires, à la fois nouveaux et extrêmement prégnants, les professionnels de la filière viticole ont fait évoluer leurs pratiques en matière de protection du vignoble (diminution du nombre de traitements, réduction des doses...). Dans le même temps, certaines molécules, certes très efficaces mais plus toxiques pour l’homme et l’environnement, ont été interdites sur notre territoire, laissant ainsi aux vignerons un panel de solutions réduit pour protéger la vigne. Ce constat est également valable pour la viticulture biologique où seuls des produits de contact, facilement lessivables par les pluies, sont autorisés avec une limitation de la quantité de cuivre métal (4 kg/ha/an).
Ces évolutions changent la donne et imposent un pilotage plus précis des traitements afin de protéger la récolte tout en respectant la réglementation ainsi que les différents cahiers des charges (AB, Terra Vitis, HVE...).
Afin d’aider les vignerons dans cette tâche délicate, différents outils ont été développés, allant de la simple acquisition de données météo jusqu’au conseil de la date de traitement et de la dose à appliquer.

Retrouvez l'article de Bernard Burtschy : Les pesticides : le meilleur et parfois le pire.

L’acquisition des données météorologiques

Ces données constituent les briques de base de toute optimisation de la protection. Elles peuvent être obtenues simplement à l’aide d’un pluviomètre et d’un thermomètre, plus couramment à l’aide d’une station météo connectée ou, plus facilement encore, en ayant recours aux technologies radar développées par Météo France.

Cette dernière méthode permet d’acquérir des données météo fiables sur l’ensemble du vignoble français sans nécessiter l’installation d’une station météo physique sur son exploitation. La technologie utilisée repose principalement sur l’utilisation de radars qui détectent et localisent les pluies. La maille de restitution proposée par Météo France est celle du km², ce qui est bien souvent en cohérence avec la taille d’une exploitation viticole.

Les modèles épidémiologiques, c’est quoi ?

Un modèle est un système physique, mathématique ou logique représentant les structures essentielles d'une réalité et capable à son niveau d'en expliquer ou d'en reproduire dynamiquement le fonctionnement (Birou 1966). Utilisés dans tous les secteurs d’activité (climat, économie, épidémiologie, démographie...), la viticulture n’échappe pas à la règle et de nombreux modèles, mécanistes ou probabilistes, ont été développés en viticulture afin d’anticiper le développement des maladies et des ravageurs, l’objectif étant de ne traiter que lorsque cela est réellement nécessaire. Ils permettent ainsi de supprimer les traitements dits d’assurance et d’évaluer le niveau de risque afin d’ajuster la dose de produit à utiliser lors de chaque intervention. Leur fonctionnement repose quasi-systématiquement sur l’utilisation de données météorologiques comme variables d’entrée.

Retrouvez aussi notre article Pourquoi traite-t-on la vigne ?

Des Outils d’Aide à la Décision (OADs) pour aller encore plus loin

Un OAD est un algorithme qui regroupe le plus d’informations utiles possible, les analyse et délivre des indicateurs pratiques afin de guider l’utilisateur vers la meilleure prise de décision possible (Davy, 2018). Pour ceux à qui cette définition ne parle pas, on prendra en exemple les applications utilisées pour établir un itinéraire routier (Waze, Maps...). Il s’agit là d’OADs qui proposent au conducteur un ou plusieurs itinéraires en fonction des paramètres qu’il a préalablement renseignés (trajet le plus rapide, le plus court...) et des conditions de circulation. Les OADs intègrent souvent un ou plusieurs modèles dont les variables de sortie sont combinées avec des informations complémentaires afin de conseiller l’utilisateur sur la meilleure stratégie à adopter.

En viticulture, les OADs les plus avancés permettent de conseiller l’utilisateur sur la date et la dose à laquelle les traitements doivent être réalisés. Face à des contraintes réglementaires de plus en plus lourdes, ils peuvent également être couplés à une base de données afin de fournir des informations réglementaires sur les produits phytosanitaires (dose, délai de rentrée, ZNT, délai avant récolte, compatibilité des mélanges...).

Pour en savoir plus sur les OADs développés par l’IFV (Institut Français de la Vigne et du Vin) :

- OADEX : pour accéder à des données météo localisées sur son exploitation et à un modèle mildiou (inscription et abonnement en ligne)
- DeciTrait® : un OAD dédié à la protection du vignoble (www.decitrait.vignevin-epicure.com)

Quelles perspectives pour demain ?

Si la profession est pourvue de plusieurs OADs, force est de reconnaître que peu d’entre eux ont été conçus pour communiquer avec les autres outils utilisés sur l’exploitation comme les logiciels de traçabilité par exemple. Pourtant, pour fonctionner correctement, ces différents outils ont besoin de données qui bien souvent sont les mêmes, obligeant ainsi l’utilisateur à saisir plusieurs fois la même information dans plusieurs outils différents, perte inutile d’énergie sans plus-value qui va à l’encontre de l’objectif recherché : celui de simplifier le travail du vigneron. Si quelques pas vers une meilleure communication entre les outils ont bel et bien été effectués (intégration de DeciTrait dans Process2Wine par exemple), le challenge d’une interopérabilité facile et aboutie reste à relever afin de faciliter la vie de nos vignerons qui en ont plus que jamais besoin .

Vous avez aimé cet article ? Retrouvez un autre article d'Alex Davy : Pourquoi est-ce si difficile de se passer de produits phytosanitaires en viticulture ?

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