Des vins clandestins en Irak ?

Des vins clandestins en Irak ?

Terre native de la viticulture, la Mésopotamie abrite aujourd'hui des vignerons pas comme les autres. En effet, au Kurdistan, dans un climat géopolitique particulièrement compliqué, des viticulteurs continuent à cultiver la vigne et à en vinifier les fruits…discrètement.

Une région viticole oubliée

Contrairement à ce que l'on pourrait penser, cette quasi-disparition de la viticulture locale n'est pas une conséquence de la prédominance de la religion islamique dans la région. Elle découle en réalité du génocide connu par le Kurdistan de 1987 à 1991 et de l'exil de cette population. Avant cela, la production de vin était très courante et il n'était pas rare d'utiliser, à l'image des Géorgiens, de grandes jarres en terre pour le processus de vinification. Le Kurdistan était également très réputé pour son Arak, un spiritueux anisé emblématique du Moyen-Orient issu de la distillation de moûts de raisins.

Mais à la suite de ces tristes événements, les vignes ont été abandonnées. Ce phénomène a pris de l'ampleur avec les années, le terrorisme né des guerres devenant de plus en plus présent et obligeant les viticulteurs à agir en toute clandestinité.

Une production confidentielle

Ce territoire offre de nombreux cépages autochtones tels que le Mermerk, le Rosh Mew, le Taefi, le Kamali, le Helwani, le Zarek, le Hejaze ou le Khateni. Fait rarissime en Europe, ici toutes les variétés sont pré-phylloxériques puisque le célèbre puceron ravageur ne sévit pas. En effet, les vignes sont protégées de la plupart des maladies grâce aux conditions météorologiques et à la typologie des sols.

On trouve donc des ceps non greffés sur des parcelles bien entretenues. Souvent proches de leur état sauvage, ils se révèlent grimpants le long des édifices de la région ou forment des haies au milieu des ruines laissées par les conflits humains. De grands amoureux du vin produisent en toute discrétion et dans des conditions presque précaires des cuvées fruitées qui ne sont pas toujours très stables. Une fois les raisins récoltés pas de pressoir à l'horizon mais des bottes propres, comme le faisaient nos ancêtres. Ensuite, la fermentation s'effectue avec des levures naturelles dans des bonbonnes, une paille savamment placée laissant s'échapper le gaz carbonique.

Très différente de celles que nous connaissons bien, cette région viticole a cependant des atouts indéniables. En plus de sa réserve incroyable de cépages anciens, son utilisation de méthodes non chimiques implique une profonde préservation de la biodiversité.

Une fois la vinification terminée, ces breuvages sont conservés dans des contenants de récupération. De manière générale, on ne compte pas plus de quelques centaines de bouteilles par an et par vigneron. Une production très confidentielle donc, qui est vendue de façon très informelle, de la main à la main ou dans les petites épiceries locales. Elle est également utilisée comme vin de messe dans les provinces chrétiennes. Ici, le vin est devenu lui-aussi un outil de résistance.

Lisez notre précédent Tour du monde des vignobles : la Suisse.

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