La chronique de Loïc et Olivier #6

La chronique de Loïc et Olivier #6

Bonjour les amis, bienvenus dans notre sixième chronique, et oui déjà.
La dernière fois, je ne savais pas encore quel serait son thème. Dans la saisonnalité de notre petite de vigne celui-ci s’impose : la fleur !
Juste avant, on va faire un peu le tour de notre actu, à LE vigne et à Vinexpo.

Voici dans la joie et la bonne humeur un condensé du cocktail (à base de vin) de nos vies dans la parcelle Siri.

Le temps des gros travaux dans la parcelle est passé, nous allons oublier nos gros bras pour utiliser nos petits doigts.
Cinq kilomètres de rangs nous attendent pour quelques soins délicats.
Avec Olivier, nous sommes toujours sous le charme de cette renaissance de LE vigne, de la force de vie qu’elle dégage pour se réinventer.
La vague verte continue sa progression. L’enclos s’est paré d’une chevelure faite des milliers de branches qui ondulent nonchalamment au vent.
Les pieds cagneux comme des squelettes sont maintenant habillés par la matière charnelle des feuilles.
La pousse est un peu hirsute, les rangs de petits verdot atteignent un bon mètre soixante et leurs rameaux souples se balancent. Pour l’instant nous laissons cette toison sans coiffure, mais dès la semaine prochaine, on amène tout le monde chez le coiffeur. En fait c’est plutôt le coiffeur qui viendra à domicile pour donner un bon coup de propre.
Une parcelle hipster ça change tout.
Nous entrons dans le troisième temps du cycle annuel de LE vigne, après la dormance hivernale, la croissance du printemps bat son plein, et avec la floraison qui commence, voici le cycle fructifère.

Grosse bourrasque !
Grosse bourrasque !

Avis de tempête : quand ça cogne en Gascogne

Première semaine de juin, la tempête Miguel nous a fait quelques frayeurs.
A ce stade de leur croissance, les branches ne se sont pas encore transformées en bois et cassent facilement. Quand la météo, avec laquelle nous vivons en permanence, a annoncée l’arrivée de cette turbulence espagnole, nous avons fait “fissa”.
Les rameaux de notre parcelle sont à la perpendiculaire des vents du golfe de Gascogne. C’est rare que ce soit le cas à cette saison, mais Miguel a soufflé à pas loin de 100 kms à l’heure. C’est un signe des temps de dérèglement climatique

En prévision du phénomène, nous avons anticipé l’arrimage des branches pour qu’elles ne ”branjollent” pas comme on dit dans notre médoc. Elles sont maintenues plaquées par deux fils de fer qui courent tout le long du rang. Le but du jeu de cette manip', le relevage, est de faire remonter ces fils d’autant que les branches gagnent en hauteur. Quand il fait beau et chaud, voir l’inverse (chaud et beau au choix), elles poussent allègrement de 5 à 10 cm par jour.
Miguel a bien essayé de faire quelques passes tauromachiques à nos cépages. Mais un combat vegan : pas trop pour lui.
LE vigne n’a pas eu trop de casse, le premier rang un peu, ouf !
Une nouvelle donne climatique, encore une fois, pas en la faveur de notre métier.

Notre stand à Vinexpo
Notre stand à Vinexpo

On s’est fait beau pour aller à Vinexpo : des paysans à la ville

Toujours avec nos œnologues préférés, Christophe Coupez et Karin Pasquet de la Chambre d’Agriculture, nous avons tenu un stand dans ce salon international du vin.

Vinexpo c’est d’abord une grosse machine, 45 000 visiteurs, 2300 producteurs et distributeurs. Lors de ces grandes manifestations vineuses, j’ai toujours eu de la compassion pour ceux qui, derrière leur stand, attendent le chaland, servent leur production et en parlent toute la journée. Et bien sur ce coup là c’était nous.
Dans le flot de visiteurs, une grosse partie étaient des chinois. Le concept de notre micro propriété en a séduit quelques uns. Mais il n’est pas facile de leur expliquer le fait d’être situé à Pauillac sans A.O.C., avec pour dominante, un cépage rare.

Notre clientèle n’est pas celle-la.
Sans avoir trop réfléchi à la question commerciale, intuitivement, nous nous rapprocherons d’acheteurs ayant de l’empathie pour notre singularité.
La présence sur ce type de manifestation est un gros accélérateur pour montrer notre bébé. Un premier sillon pour nous faire connaître. En ce sens, nous avons pu effectivement rencontrer un nombre important de pros de la filière qui, sans être immédiatement des acheteurs, nous aurons identifiés. Un travail d’image de marque comme on dit.

Dès l’automne, quand nous nous rapprocherons de la date de mise en bouteille hivernale nous reprendrons contact avec ceux qui correspondent à notre O.V.N.I. (NDLR : Objet Vineux Non Identifié).

Décollage de notre vin
Décollage de notre vin

Comme nous l’avons fait dans tous nos partenariats, nos choix commerciaux iront vers ceux pour qui nous avons de la sympathie. Dans cette phase de lancement, nous privilégierons les acheteurs qui vont physiquement au contact des particuliers. La présentation d’un nouveau vin ne peux pas être virtuelle, il faut créer les bonnes conditions pour un premier contact positif, un contact sensoriel.
Nous irons vers ceux qui peuvent accompagner la réputation à construire de notre vin.
Rien n’est décidé, mais tous les passionnés sont les bienvenus : les cavistes, les sommeliers et restaurateurs. Ceux qui auront la capacité à faire passer un bon moment aux amateurs autour de nos bouteilles.

En dehors de ceux-la, on pourra travailler avec des importateurs de pépites, sélectionnés sur le volet. Pour répartir le risque commercial, on peut offrir de toutes petites quantités sur des niches à l’export.
Intuitivement, Olivier et moi sommes d’accord sur la finalité de notre passion, donner du bon temps aux amoureux du vin, aux "Amateurs" avec un A majuscule. Celles et ceux qui sauront trouver là, le plaisir et la bonne humeur que nous mettons dans nos bouteilles.
Vinexpo a bien joué son rôle d'accélérateur pour voir ou revoir, et élargir notre réseau vin.

Yves Beck dit “Beckustator” & Jean-Marc Quarin
Yves Beck dit “Beckustator” & Jean-Marc Quarin

Quand tu trinques avec les critiques

Et là, j’ai une anecdote énorme.
Le dernier jour du salon arrivent, séparément mais au même moment, Yves Beck qui a bien dégusté nos vins et Jean-Marc Quarin, dégustateur journaliste de Bordeaux. Voir l’un ou l’autre est déjà une chance, mais les deux en même temps, c’est d’abord improbable, carrément génial mais pas évident.

A eux deux, ils ont le pouvoir de faire ou défaire notre réputation. Donc je flippe un peu, voir beaucoup. Je fais celui qui assure, et voilà nos deux critiques assis autour de la même table, moi et notre vin au milieu. Un nouveau concept : la dégustation ping pong. Nous aurions voulu le faire exprès, nous n’y serions jamais arrivé.

L’autre volet sympa de Vinexpo, ce sont les moments passés avec l’équipe de Toutlevin.com qui avait un beau stand garni de jeunes et talentueux blogueurs fous passionnés de vin, un régal.
Il y avait aussi Charlotte, notre Rédactrice en Chef préférée. Mais là, sincèrement, je ne peux pas tout raconter je vais me faire censurer, encore… Pas vrai Charlotte ? Bon, j’ai promis de ne rien dire. SMILE.

A fleur de peau

LE vigne ne fait définitivement rien comme les autres. Tous les arbres fruitiers jouent de créativité pour fleurir et parfumer nos belles campagnes. Mais LE vigne nous flanque de petites fleurs rachitiques qu’il faut regarder à la loupe tellement elles sont petites.

Tout le monde sur les réseaux s’esbaudit en ce moment des douces effluves. La nature m’a doté d’un gros appendice (nasal) et je vous jure que je dois aller le coller de près pour humer ces fleurettes.
Je vais aller dans la boutique Caudalie acheter leur parfum “Fleur de vigne” et en asperger les rangs.

Plus sérieusement, la fleur marque un vrai tournant dans le calendrier viticole. Le fleur augure la récolte à venir. Elle se déroule une centaine de jours avant la récolte. Là aussi, le changement climatique bouleverse ce cycle naturel qui s’est réduit quasiment d’une quinzaine de jours en deux décennies.

A l’école primaire, on nous apprend que la fleur c’est l’histoire de la petite graine du papa, le pollen, qui endort la maman pour… vous connaissez la suite. Sauf que pour LE vigne, elle est à la fois le papa et la maman, ça va jaser ! Quoi encore un référendum ?
On m’avait dit qu’il se passait des choses bizarres dans le Médoc…

Voilà pourquoi par égalitarisme, je parle dorénavant de LE vigne.

Au moment où je m’amuse à écrire cette chronique, il tombe des hallebardes sur le vigne. Notre petite fleur n’aime pas du tout ça, car la petite graine va lamentablement être rincée par la pluie et ne fera pas de fruit. C’est ce que l’on appelle la coulure. Les pieds qui coulent sont des coulards, et c’est bien fait pour eux. Les coulards, c’est bien connus vont en bande. Un triste genre qu’il ne faut pas stigmatiser mais qui empêche les vignerons de bien travailler.

Ces conditions météo nous mettent Olivier et moi à fleur de peau. Même si les fleurs (de LE vigne) ne sont pas en pot, elle n’en n'ont pas, nous non plus du reste.
Nous voilà bien empotés à ne rien pouvoir faire.

De plus les fleurettes aiment bien quand il fait chaud, et les nuages empêchent une bonne insolation. Des épisodes alternés de changements de température vont faire des séquences de floraison/pollinisation successives. On peut donc pronostiquer à terme des raisins avec des maturités décalées au moment de la vendange.

C'est ici que les oiseaux et les insectes jouent un rôle essentiel en transportant le pollen d'une fleur à l'autre, leur permettant ainsi de se développer.
Encore une fois nous sommes tout à la joie de favoriser un biotop riche par l’enherbement et la forestation proche. Certains parleront d’agroforesterie, nous avons la chance d’être naturellement dans cette démarche.

Ce mois-ci nous ne nous sommes nous pas fait les chais, dommage...
A cette saison chaude, les barriques sont bien remplies et fermées. Il n’y a aucune action sur le vin si ce n’est vérifier mensuellement tout au long de l’été que le vin se repose bien.
Les chais resteront clos pour éviter la chaleur de rentrer et nous nous y rendrons le moins possible.
Le mois prochain, si tout se passe bien nous verrons les bébés raisins prendre forme.

Voilà les nouvelles du front, j'espère que vous aurez eu autant de plaisir à lire cette chronique que j’en ai eu à l’écrire.
N'hésitez pas, laissez vos commentaires.
Portez-vous bien !
Et vive LE vigne !

Éclosion des grappes
Éclosion des grappes

Crédit photos : Loïc Siri

Retrouvez la série complète de la Chronique de Loïc et Olivier :

- Episode 1 : La chronique de Loïc et Olivier
- Episode 2 : C'est la taille qui fait la différence
- Episode 3 : Tourner en barrique, mais pas que ...
- Episode 4 : Avril 2019
- Episode 5 : Du sol au ciel : sois bio et tais-toi
- Episode 7 : Le gringo, la bimbo, le bobo et le robot
- Episode 8 : Août sans doutes
- Episode 9 : Un vin peut en cacher un autre

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