Nicolas Lesaint, L'homme de Reignac

Nicolas Lesaint, L'homme de Reignac

C'est tout d'abord une croupe de star qui culmine au pays des crus de Bordeaux, à l'ouest de l'Entre-Deux-Mers, repérée depuis longtemps par un "flying wine-maker" de la race des géants.

Quand Michel Rolland contacte dans les années 90 le prince de la jambe de velours, un certain Yves Vatelot alias Mr Silk Epil, le choix d'une belle endormie va vite s'imposer. Reignac, c'est d'abord un concentré des meilleurs terroirs bordelais, argilo-calcaire et argilo-graveleux, le choix va s'imposer naturellement.

Entre un château XVIème d'un classicisme discret rénové sans ostentation et une serre signée Eiffel, un pigeonnier-salle-de-dégustation unique au monde, un vignoble de plus de 145 HA (dont 77 ha de vignes) aux parcelles religieusement sélectionnées, un chai couronné par un prix de l'innovation, un directeur hors normes, on comprend pourquoi le vin, les vins, vont vite sortir du lot. Les dégustateurs de la planète s'avoueront bluffés à plusieurs reprises au terme de dégustations souveraines, officielles et plus officieuses qui aplanissent les différences de naissance, la dégustation à l'aveugle.

Reignac, c'est aussi un royaume guidé par une sorte de chef indien. De ces hommes qui parlent à l'oreille du végétal, qui allie l'intelligence émotionnelle à une intelligence pragmatique, un chef de tribu.

Nicolas Lesaint, ça ne s'invente pas, ingénieur agronome, botaniste fervent, blogger et photographe notable, dessinateur savoureux, règne en maître tout en finesse sur son royaume de merlots, cabernets franc et sauvignon, sémillon sur lesquels il veille avec une rigueur scientifique mais non bornée à ces mêmes connaissances.

Le printemps incertain qui blanchit et cisèle la lumière en ce matin de primeurs 2017, éclaire la propriété qui se livre romantique à souhait, flanquée à sa gauche d'une serre et d'un pigeonnier qui cache bien son jeu. Reignac et son vignoble s'offre à nous, comme un cadeau au pied du sapin de Noël.

Le vignoble tout juste débourré anticipe le prochain millésime, les inter-rangs labourés, ensemencés. Les chais qui étirent leurs élégance teintée de vert-de-gris témoignent en ce printemps de 2018, qu'ici la remise en question y est permanente, la cuverie vient d'y être totalement revue et l'inox des cuves tronconiques inversées en témoignent.

Au parc boisé qui entoure la bâtisse qui croule sous la glycine au printemps, s'est ajouté des mixed-borders à l'anglaise, au fond du parc, on peut entrevoir les hampes fluorescentes des euphorbes et sur le devant, les parterres fraîchement dessinées et plantés de ligustrums. Le jardin de simples baptisé "Jardin des senteurs" répond aux connaissances de botaniste de l'homme, couplées à sa plume qui sait aussi aligner les mots mais aussi donner vie à un personnage bourré d'humour, le fameux Reignyx, qui dépeint les aléas de la vie du vignoble mais aussi de l'actu souvent désopilante de la vie politique.

En ce matin de Mars, un Nicolas Lesaint à la silhouette longue et racée mène la fine fleur des bloggers et journalistes à la cadence de sa passion jusqu'au pigeonnier, siège de dégustations ordonnancées qui alternent le rouge des cuvées au blanc. Ce matin, c'est une dégustation comparative internationale des fameux "Best of Wine Tourism" que Reignac a remporté en 2017, initié par la Chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux et Catherine Leparmentier-Dayot qui s'y déroule. Reignac s'impose en maître du partage, en roi du 3.0 mais aussi en roi de la dégustation à l'aveugle, lors des déjeuners qui s'y ensuivent. La constance de qualité des vins de Reignac font face à beaucoup de crus les plus réputés, cette année il pourra même rivaliser avec un Ausone 1999, Mouton-Rothschild ne parviendra pas à convaincre l'ensemble des dégustateurs, tous rompus à l'exercice de la dégustation avec ou sans étiquette.

De loin on peut entrevoir les bambous de la station d'épuration qui prolifèrent gaiement, un peu trop même. Ici l'écologie intelligente rime avec beauté et paysage. A copier et s'inspirer.

Crédit photo : Marilyn Johnson

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